jeudi 31 janvier 2013

3 apercus d'Hanokh Levin. Un agitateur d'idées. Religion. Mort. Souffrance

3 textes plutôt grinçants d' H. Levin sur des sujets aussi sérieux que la religion, la mort ou la souffrance.
LA GENÈSE
Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre.
Et la terre n’était que chaos et les ténèbres régnaient sur la surface de l’abîme et l’esprit de Dieu planait sur les eaux.
Et Dieu dit : « Que la lumière soit ! »
Et tout resta noir.
Et la terre n’était que chaos et les ténèbres régnaient sur la surface
de l’abîme. Et il fut soir et il fut matin - premier jour.
Et Dieu se leva au deuxième jour et dit : « Que la lumière soit ! »
Et tout resta noir.
Et la terre n’était que chaos et les ténèbres régnaient sur la surface
de l’abîme. Et il fut soir et il fut matin - deuxième jour.
Et Dieu se leva au troisième jour et dit : « Pour la troisième et dernière fois, que la lumière soit ! »
Et tout resta noir.
Et la terre n’était que chaos et les ténèbres régnaient sur la surface
de l’abîme.
Et il fut soir et il fut matin - troisième jour.
Et Dieu se tut le quatrième jour et le cinquième jour.
Et au sixième jour, Dieu se leva et poussa un grand cri :
« Ou bien je suis Dieu ou bien je ne suis pas Dieu - que la lumière
soit, merde! »
Et une toute petite lumière s’alluma à la fenêtre d’un immeuble et un
homme en pyjama se pencha vers l’extérieur et dit : « Qui est-ce qui nous réveille au beau milieu de la nuit en criant qu’il est le bon Dieu? »
Scier ma femme en deux, je peux le faire aussi, 1966

2. LETTRE D’UN SOLDAT À SON PÈRE (chanson)
Cher papa
Quand tu seras debout au-dessus de ma tombe
Vieux fatigué solitaire
Que tu verras mon corps se recouvrir de terre
Toi en haut, papa, et moi dans la pénombre
N’essaie pas de prendre une posture inspirée
Tête haute regard fier

Profite bien, papa, de notre ultime chair à chair
Bientôt tu n’auras plus que tes yeux pour pleurer
Ne retiens pas tes larmes oublie la dignité
Ne joue pas les vainqueurs
Demande-toi plutôt, papa, si c’est à ton honneur
D’avoir soudain un fils étendu à tes pieds
Ne parle surtout pas de ton grand sacrifice
Le sacrifice c’est moi seul qui l’ai fait
Garde tes grands mots, papa, ils seront sans effet
Je n’entendrai plus rien au fond du précipice

Cher papa
Quand tu seras debout au-dessus de ma tombe
Vieux fatigué solitaire
Que tu verras mon corps se recouvrir de terre
Papa, demande-moi pardon 
Reine de la salle de bains, 1970




3. Mesdames et messieurs, regardez,
un homme tombe du haut d’un toit.
Les bras écartés, il tournoie dans les airs,
son cri se brise et résonne.
Vous reculez d’un pas, de peur
que son sang vous éclabousse
mais, fascinés, vous suivez sa chute
et attendez, avec délectation et horreur,
l’instant fatal, l’instant unique
où son corps heurtera le sol.
N’y cherchez pas un sens ni une morale,
contentez-vous d’apprécier le spectacle : un homme tombe
et bientôt il sera mort.
Les Souffrances de Job
 

Kroum l'ectoplasme, autre vidéo + commentaires+ acte I, scène 1

Ci après un autre extrait vidéo de la pièce Kroum l'ectoplasme, avec commentaires du metteur en scène, ici J-Jacques Mateu,  au Théâtre Sorano de Toulouse en 2010


Et ici le début de la pièce (début de la vidéo) : l'arrivée de Kroum et ses retrouvailles avec sa mère
Aéroport. Fin d’après-midi. La Mère, Shkitt.
LA MÈRE
L’avion a atterri. Je vais revoir mon fils dans un petit instant. Ça y est, le voilà!!

Entre Kroum, une valise à la main. Il étreint la Mère.
KROUM
Maman, je n’ai pas réussi. Je n’ai trouvé ni la fortune ni le bonheur à l’étranger. Je n’ai pas avancé d’un pouce, je ne me suis pas amusé, pas marié, pas même fiancé. Je n’ai rencontré personne. Je n’ai rien acheté et je ne ramène rien. Dans ma valise, il n’y a que du linge sale et des affaires de toilette. Voilà, je t’ai tout dit et je te demande maintenant de me laisser tranquille.
LA MÈRE (regarde la valise)
Il me prépare sûrement une surprise.
KROUM
Non.
LA MÈRE
Mais si, il a bien une petite surprise pour sa maman.
KROUM
Non !
LA MÈRE
Pourquoi tu cries ? Quelqu’un t’a demandé quelque chose ? Tu es rentré pour qu’on se dispute ?
Elle se met à pleurer.




Kroum l'ectoplasme, H. Levin. Intrigue et extrait de la pièce

Kroum l'ectoplasme, d'Hanokh Levin. L'intrigue de la pièce.
Contrairement aux apparences, Kroum l'ectoplasme n'est pas le héros d'un joli conte pour enfant. C'est plutôt l'anti-héros, celui qui revient dans son quartier, chez sa mère, après avoir tenté sa chance à l'étranger.  Bredouille.    Retour à la case départ, aux mêmes amis et aux mêmes rêves.   
En attendant le coup de baguette magique qui viendra le propulser ailleurs, riche et dans les bras d'une superbe femme, il parle d'écrire un roman sur son quartier. Trouda-la-bougeotte, Doupa-la-godiche, Tougati-l'affligé : comme Kroum, ses amis portent chacun un drôle de prénom, accolé inexorablement à un qualificatif aliénant. Comme lui, ils sont conscients de leur état et de leurs limites. Sauf qu'eux s'accommodent tant bien que mal de leur condition tandis que Kroum la refuse tout en ne faisant rien pour y échapper. Avec humour, on redécouvre qu'il est plus facile de renoncer à ses rêves que de leur donner vie.

Extrait d'un spectacle de 2012, ms Isabelle Hurtin.

Pour ceux intéréssés par le théâtre pour leur poursuite d'étude

Le lien parle pour moi. Rien de plus, camarade bonsoir.

Merci Madame Filippeti, notre chère ministre de la culture, mes respects mon hommage.

Moi, je parle pour Edgar 
(Ministère de la culture)

EdgarM

Affeux, sales et méchants

C'est un film d'Ettore Scola (1976) sur le thème de la famille.
La aussi une violente satire comique
Regardez l'extrait, prenez des notes  : quels sont  les thèmes abordés? comment l'interprétation rend-elle le comique?
(on va le rejouer en impro à la séance prochaine)

mercredi 30 janvier 2013

Funérailles d'Hiver. Lieux et temporalité

 Lieu                Temporalité         Indications scéniques

 Tableau 1                              Chez Alté            La nuit            « La nuit. Chez les Bobitshek. Latschek est au chevet d’Alté 
 La mort de la cousine alté             Bobitshek                               qui agonise » 
                                                                                « L’ange de la mort, Angel Samuelov, apparaît en arrière-
                                                                                plan » (p. 52)

 Tableau 2                              dans la rue          La nuit            « La nuit. La porte de l’appartement de la cousine 
 L’annonce de la mort d’alté à          et chez                                 Shratzia. Côté intérieur : l’entrée. Côté extérieur : le palier 
 la famille                             Shratzia                                où se tient Latschek qui frappe à la porte » (p. 54) 
                                                                                « À cet instant apparaît dans l’encadrement d’une petite 
                                                                                lucarne derrière eux la tête de Latschek, juché sur une 
                                                                                échelle plaquée contre la façade. » (p. 64) 
                                                                                « La lumière s’allume dans l’appartement voisin. 
                                                                                Le professeur Kipernaï apparaît sur son balcon »

 Tableau 3                              Sur la plage        À l’aube            « L’aube d’une froide journée sur la plage ; le vent, la 
 Le pique-nique sur la plage                                                    pluie. Le bruit des vagues qui déferlent sur la grève. » 
                                                                                (p. 70) « Rosenzweig : Jamais vu ça ! Soudain ils se sont 
                                                                                envolés, toute la bande, envolée ! » 

 Tableau 4                              L’Himalaya           Le                 « Le matin, la joyeuse bande – Schratzia, Rashèss, 
 Fuite vers l’Himalaya                                       lendemain          Vélvétsia, Tsitskéva et Popotshenko – est en train  
                                                            matin               d’escalader une haute montagne couverte de neiges 
                                                                                éternelles, au Tibet. Ils approchent du sommet. » 
                                                                                « Étant donné que le sommet est exigu, ils se pressent 
                                                                                contre Shahmandrina, qu’ils poussent un peu » (p. 88) 
                                                                                « Ils commencent tous à remuer les bras et décollent 
                                                                                […] » (p. 98)

 Tableau 5                              Sur le toit         Vers                « Le toit en pente raide d’un immeuble très élevé. Les 
 Retour vers la maison pour             d’un                 15 heures          rescapés de la joyeuse bande […] s’accrochent aux tuiles 
 le mariage : Le rendez-vous            immeuble             (p. 86)            afin de ne pas glisser. » (p. 101) 
 au salon de beauté français                                                    « […] ils se rattrapent in extremis au rebord du toit  […] » 
 international de guivataïm                                                     (p. 102) 

 Tableau 6                              L’allée des          Fin de             « Fin de journée, l’allée de sycomores qui mène à la 
 À l’entrée du cimetière                sycomores           journée             maison mortuaire du cimetière. Un banc isolé »
                                        du cimetière

 Tableau 7                              La salle             Le soir            « Une luxueuse salle de réception en ville »
 Le mariage de Shratzia                 de mariage

 Tableau 8                              En chemin            L’aube du          « Dans une rue de la ville »
 Les funérailles d’Alté                 vers le              lendemain
                                        cimetière

Funérailles d'hiver, bref résumé de la pièce

Funérailles d'hiver, d'Hanokh Levin.
Deux familles se préparent au jour le plus important de leur existence : le mariage de leurs enfants. La veille de la cérémonie, tous dorment, quand on cogne à la porte ! C’est le cousin de la future mariée qui vient annoncer la mort de sa mère. Famille et belle-famille restent sourdes aux appels du cousin pour ne pas avoir à remettre la célébration du mariage et tentent de trouver une solution pour éviter l’annulation. Et pour cela, il faut tout faire pour ne pas «être mis au courant » de la mort de la mère ! S’ensuit donc un certain nombre de tentatives...

Farce surréaliste, fantastique, burlesque et cruelle, en huit tableaux, d’une rare intensité dramatique. Peinture impitoyable d’une société humaine prête à toutes les bassesses pour atteindre un but qui n'est fait que de paraître et de bêtise.

Ceux qui marchent dans l'obscurité, Hanokh Levin. Intrigue et extrait video

"Ceux qui marchent dans l'obscurité", de H. Levin, m.e.s. L. Hubinont, teaser

L'intrigue : Trois personnages se lèvent en pleine nuit et décident de marcher. Vers où? Pourquoi? Ils marchent et s’inventent ce qu’ils sont. Peut-être sont-ils des agents secrets internationaux, peut-être des amants à la recherche de leur bien aimée disparue ou peut-être des hommes tout ce qu’il y a de plus banal? Au fil de leur marche nocturne ils rencontreront leurs pensées, leurs doubles, leurs morts, Dieu aussi. Chacun avec sa valise, chacun avec son passé.
Dans un style tragi-comique, l’auteur israélien Hanokh Levin nous emmène dans un dédale de questions : Qui sommes-nous ? Que cherchons-nous? Vers où allons-nous? Guidés par la musique, vous êtes invités à partager l’errance drolatique et existentielle des 36 personnages qui composent cette fantaisie nocturne.

Le spectacle ci-dessus, mis en scène par L. Hubinont, est de 2012

Yaacobi et Leidental, la pièce qui a fait connaître Hanokh Levin

"Yaacobi et Leidental", présentation vidéo

Comédie à l’humour ravageur, Yaacobi et Leidental s’articule autour d’un triangle amoureux insolite : deux amis tombent amoureux de la même femme et de son « gros-popotin »…

C'est l'histoire d'un trio amoureux quelque peu survolté. Si l'auteur intitule cette comédie en trente tableaux et douze chansons du seul nom des deux garçons, la fille qui est entre eux, Ruth, est au moins aussi importante… C'est un peu Jules et Jim mais version Israël années 1970 et surtout pas dans un monde intellectuel… ce qui n'interdit jamais une certaine poésie. L'écrivain Hanokh Levin  s'est souvent penché sur le sort des humbles, du petit peuple de Tel-Aviv, de leurs rêves scintillants. On est ici du côté d'un cabaret sarcastique, blagueur et délirant, jamais trop méchant.
Yaacobi (Manuel Le Lièvre) rêve d'amour. Il croit deviner son destin en la personne de la pulpeuse - et piquante à la fois - Ruth (Agnès Pontier), qui prétend être pianiste. La musique enivre. Mais Leidental (David Migeot), le meilleur ami de Yaacobi, voudrait bien connaître, lui aussi, les affres de la passion. Et comme il fait tout comme son copain, c'est aux trousses de la belle, et parfois du couple, qu'il se lance. C'est tout ! Mais soumettez la pièce, déjà désopilante, aux accélérations de la centrifugeuse d'une mise en scène audacieuse, et la folie s'empare du théâtre !

Critique

Frédéric Bélier-Garcia est un metteur en scène qui a, dès ses débuts, sans superbe ni prétention, imposé sa personnalité et son autorité.  Cette pièce très drôle, dévastatrice, exagératrice, qui tient du cabaret, des tréteaux sinon des castelets de guignol, est construite comme une course-poursuite digne des vaudevilles classiques mais emprunte ses humeurs à des registres très divers. Le metteur en scène, ici, peut s'appuyer sur la formidable équipe artistique qu'il a réunie. Un décor comme il convient d'intérieur convenu en Israël, chez des gens jeunes et peu argentés, un extérieur idéal, des costumes à l'avenant de Sophie Perez. Une musique bien charpentée, qui emprunte au répertoire, mise en mouvements vifs par Reinhardt Wagner, trois comédiens hyperdoués qui, depuis le conservatoire, méritent tous les superlatifs. Car il faut oser y aller, comme le fait Agnès Pontier ; il faut trouver la juste distance, comme le fait David Migeot ; il faut faire d'une marionnette un homme universel, et Manuel Le Lièvre est bouleversant. On rit aux larmes et l'on est ému !
Source : le Figaro (janvier 2010, mise en scène F. Bélier-Garcia)
 

Promesses. Cabaret Hanokh Levin. Extrait du spectacle

"Promesses – Cabaret Hanokh Levin", m.e.s. G. Freixe, extraits

Il s'agit ici de sketches tirés de ses cabarets satiriques des années 1970, ici mis en scène par Guy Freixe. Ce-dernier explique :
"Deux directions s’entremêlent et tissent des liens: la dimension métaphysique, toujours sous-jacente chez Levin, où l’homme attend sans cesse d’être sauvé de son malheur d’exister, et la dimension politique, car ces promesses sont souvent mensongères et ne visent qu’à l’abus de pouvoir.
Levin allie à la fois le questionnement politique de Bertold Brecht, et l’humour de Karl Valentin. Le cabaret sera la forme artistique pour traiter cet univers : Levin s’y est employé, et nous suivrons ses pas, en faisant alterner chansons, monologues, sketchs en duo, ou trio. "


Quelques extraits : 
LA PAIX 
 Vous verrez que ça aussi, ça s’arrangera. Une nuit, vous irez dormir, et quand vous vous réveillerez- ce sera la paix. Eh oui, la paix. Alors vous, puisque c’est la paix, qu’est ce que vous faites ?... 

LE HOT DOG
LE CLIENT - Un hot dog, s’il vous plaît. Si possible, avec une saucisse bien chaude. Et un petit pain moelleux. Ce que je voudrais, c’est qu’elle soit très grande, la saucisse. Et j’aurais été ravi que le pain le soit aussi. Et j’aurais aimé vous demander que ça ne me coûte pas trop cher. Pas cher du tout. À dire vrai, ça m’aurait fait très plaisir que vous me fassiez cadeau de cette saucisse. Et, si on revenait un instant en arrière, ce que je voudrais, c’est qu’elle soit interminable, énorme, la saucisse, et que vous m’en fassiez cadeau. Et aussi que vous m’obligiez à la manger, comme une mère qui s’occupe bien de son enfant. Ce que je voudrais, c’est que vous soyez ma mère, mais seulement en ce qui concerne la saucisse, pour le reste, que vous soyez une femme totalement inconnue, mais extrêmement gentille. Et je voudrais que vous ayez une quarantaine d’années en moins et que vous soyez très belle. Et nue. Seulement le bas. Et qu’après m’avoir fait cadeau de la saucisse interminable vous couchiez avec moi sur un canapé moelleux, qui serait là, juste derrière le comptoir. Bref, ce que je voudrais, c’est que vous soyez ma mère pour la saucisse, une putain amateur pour la baise, et après la baise, que vous deveniez Caroline de Monaco pour vivre un amour torride, m’emmener en voyage à Monaco et m’épouser. Reste un problème: que faire de l’énorme saucisse? Si elle est énorme, la saucisse, elle finira par emplir tout l’univers et il n’y aura plus de place pour Monaco. Ce que je voudrais, c’est qu’il vous pousse une barbe, que vous vous transformiez en Messie, que vous résolviez le problème de la saucisse, et que vous redeveniez Caroline de Monaco. Comme vous voyez, je place en vous de grands, d’immenses espoirs. Tant que vous ne me tendez pas le hot dog, tout est permis, tout est encore possible.
(La vendeuse lui tend le hot dog. Un temps)
Merci. Dommage. 


"Une laborieuse entreprise" - Hanokh Levin. Intrigue et Bande-annonce

"Une laborieuse entreprise" - bande-annonce

Une laborieuse entreprise. L'intrigue.  
C’est l’histoire d’un type (Yona) qui se réveille au milieu de la nuit avec l'évidente certitude que sa vie fut merdique…
Pas même un gâchis, mais qu'elle aurait simplement pu ne pas avoir lieu, sans que personne ne s'en aperçoive. Une prise de conscience métaphysique brutale mais revigorante.
Il réveille sa femme (Leviva)  aussi impitoyablement qu'il peut pour engager un combat sans pitié et sans issue. Théâtre de la cruauté. Que l'indicible soit dit le plus férocement possible. Si c’est trop raisonné, cela devient cynique.

Les grandes questions que l’on se pose et que l’on peut trouver exposées de façon très élaborée chez des auteurs plus raisonnables sont exprimés ici avec des mots d'une affligeante banalité, d'une cinglante sincérité qui confine à la torture.
Christophe Sermet, metteur en scène de la pièce (Bruxelles, 2011)

LE TEXTE; 2 EXTRAITS1.«LEVIVA : Yona, asseyons-nous un instant calmement, l’hystérie est passée, viens. Soyons
pragmatiques : où iras-tu et que feras-tu ?
YONA: Je trouverai un hôtel pas trop cher, j’y resterai deux ou trois jours et je me chercherai un studio pas trop cher.
LEVIVA : Et quand tu te seras installé dans ton studio pas trop cher, tu chercheras un frigo pas
trop cher, deux ou trois chaises, un lit pas trop cher, tu t’allongeras dessus, puis tu te relèveras pour
aller chercher une femme pas trop chère. Tu termines ta vie à bon marché. »

2.. « YONA : Je suis un homme fini. Bien obligé de voir la vérité en face : je suis un homme fini.
Comment est-ce arrivé ?
Quand j’étais gosse, j’avais le monde à portée de main.
Comment tout s’est-il défait,
dissout entre mes doigts ?
A questions usées
réponses usées.
Il n’y a que ma détresse qui ne s’use pas.
Increvable, ma détresse.
Elle est là, bien fraîche et bien vivante.
Comment pourrais-je lui dire :
« S’il te plaît, arrête, tu exagères,
les gens vivent et meurent, tous d’une manière
ou d’une autre passent à côté, je n’ai inventé
ni la désillusion ni le désespoir, alors je t’en prie,aie la bonté de t’apaiser.
Du calme… » »

Présentation d'Hanokh LEVIN (1943-1999) dans théâtre contemporain.net

Né à Tel-Aviv en 1943, décédé prématurément en 1999, Hanokh Levin, figure majeure du théâtre israélien contemporain, nous a laissé une cinquantaine de pièces de théâtre, ainsi que plusieurs recueils de poésie et de prose. S’il doit une entrée en scène fracassante et sulfureuse à ses textes politiques (il dénonce dès 1969, dans son premier cabaret Toi, moi et la prochaine guerre, l’engrenage de violence induit par la politique d’occupation de son pays après la guerre de 1968), ce sont ses comédies qui, à partir de 1972, lui ouvrent en grand les portes du monde théâtral. Yaacobi et Leidental, qui sera aussi sa première mise en scène, peut être considéré comme la pierre (tri)angulaire de « l’ère Levin » en Israël, période de plus d’un quart de siècle (jusqu’en 1999) rythmée par une création presque tous les ans et presque toujours dans une mise en scène de l’auteur.

Les années 70 voient donc naître les personnages leviniens, ces petites gens dont le principal problème dans l’existence... est l’existence elle-même, principalement la leur ; qui rêvent de courir le marathon sans se rendre compte qu’ils ont mis les pieds dans des chaussures de plomb. Ils s’appellent Kroum, Popper, Yaacobi, Potroush, Kamilévitch, et nous racontent tous ce combat perdu d’avance qui nous est commun, à nous autres, êtres humains. Insérés dans le microcosme du couple, de la famille ou du quartier, ces atteints de médiocrité aigüe ont beau essayer feintes sur feintes, ils ne leurrent personne : c’est bien de nous qu’ils parlent et c’est bien nous qu’ils touchent. Nous qu’ils sauvent aussi, grâce à l’humour irrésistible d’un auteur qui ne peut que ressentir une infinie tendresse envers leur/notre maladresse constitutive.
Le succès étant au rendez-vous, Levin, qui dès le début des années 80 peut travailler sur toutes les grandes scènes de son pays, commence à chercher de nouvelles formes d’écriture et d’images scéniques. Il puise tout d’abord dans les grands mythes (Les Souffrances de Job, Les Femmes de Troie) puis façonne son propre théâtre épique (L’Enfant rêve, Ceux qui marchent dans l’obscurité) qui se cristallise en « drame moderne » au service duquel il met son langage théâtral si particulier, mélange de provocation, de poésie, de quotidien, d’humour et de formidable générosité.

Consacré par les prix israéliens les plus prestigieux, il n’en continue pas moins d’affirmer ses opinions à travers des textes politiques écrits au vitriol, ce qui lui vaut en 1982 de voir sa pièce Le Patriote rapidement retirée de l’affiche et en 1997, de déclencher une nouvelle levée de boucliers avec Meurtre.

Comme pour faire la nique à la mort, à qui, pendant trente ans, il a donné la vedette (elle apparaît dans toute son œuvre, c’est elle qui, toujours, dans un dernier éclat de rire, vient asséner la pire des humiliations), Levin, se sachant malade, écrit Requiem (ce sera aussi sa dernière mise en scène) puis Les Pleurnicheurs, dont il entreprend les répétitions en mai 1999. Réalité qui devient théâtre ou théâtre qui devient réalité, il dirige de son lit d’hôpital des acteurs qu’il cloue sur un lit d’hôpital tandis que d’autres – le personnel soignant – leur jouent, en guise de « divertissement », la tragédie d’Agamemnon... Une mort qui le rattrape sans lui laisser le temps de voir aboutir son projet. Le 18 août 1999 Hanokh Levin s’éteint après un combat de trois ans contre le cancer.

Grâce à la Maison Antoine Vitez qui, en 1991, a été la première institution à soutenir l’entreprise de traduction des pièces de Hanokh Levin, l’œuvre de ce grand auteur a pu atteindre le monde du théâtre français, qui s’est petit à petit ouvert à son écriture si singulière.
Le processus enclenché par Jacques Nichet en 1996 avec la création de Marchands de caoutchouc au Théâtre des Treize-Vents à Montpellier, s’est emballé. Après François Rancillac et Philippe Adrien, après de jeunes metteurs en scène comme Clément Poiré ou Laurent Brethome, après Stéphane Braunschweig qui a monté L’Enfant rêve en 2006 au Théâtre national de Strasbourg (repris ensuite au Théâtre de la Colline), c’est Galin Stoev, qui offre à Hanokh Levin la scène du Studio-Théâtre. À travers un choix très personnel de textes courts (parmi les dizaines que Levin a écrits tout au long de sa vie), ce jeune metteur en scène bulgare apporte sa vision – d’une extrême modernité, incisive et qui sied à merveille à l’écriture abrupte de Levin – et crée un monde aux codes d’une logique totalement loufoque mais pourtant implacable, un monde qui, même s’il est entré dans le troisième millénaire, ne pourra éviter de placer l’homme et son combat existentiel au centre de ses préoccupations... s’il ne veut pas perdre ce qui lui reste d’âme.
Laurence Sendrowicz, février 2008
Source : théâtre contemporain.net 

Calendrier spectacles février-avril 2013

Récapitulatif des spectacles prévus pour ce début de cette année 2013

Rappel : j'attends un compte rendu écrit sur l'un des spectacles de janvier, à savoir Communiqué n°10   ou Jeux de cartes, pique de Robert Lepage

Semaine du 4 au 8 février : Festival Sang Neuf au théâtre des Ateliers
Jérusalem plomb durci  : les 4, 5, 6
Rapport sur moi  : lundi 4 ou mardi 5
Débris :  jeudi 7 ou vendredi 8

[En gras, la classe prioritairement inscrite]
Vendredi 22/2 au TNP :Fin de Partie, Beckett (Premières)

Après les vacances de février 
Vendredi 15 mars : La Femme gauchère, TNP (2ndes)

Jeudi 4 avril aux Ateliers : Dénommé Gospodin (1ères)

Vendredi 12 avril  au TNP : Pantagruel (Term)

Samedi 13 avril (Célestins)  : l'Ecole des Femmes (2nde)


01. 16. 17. 62. 63.