Christophe Rauck propose une nouvelle version de Phèdre avec des caractères bien trempés et bien dessinés.
Un enchevêtrement d’armures pour humains et pour chevaux compose une gigantesque structure côté jardin, tandis que les appartements de la maison de Thésée débordent côté cour. D’immenses détails de tapisseries Renaissance ornent la scénographie majestueuse concoctée par Aurélie Thomas. On entend en fond sonore des bruits d’épées, c’est Hippolyte qui s’entraîne à l’escrime. Les éclairages sont tamisés et légers et plongent la maison dans un clair-obscur inquiétant. On sent de la tension dans ce foyer sombre et crépusculaire.
Cécile Garcia Fogel incarne une Phèdre craintive, malade, remplie de désarroi. Elle carbure aux médicaments et certainement à l’alcool. Christophe Rauck voit en elle une sorte de Gena Rowlands dans les plus grands films de Cassavetes. Elle rampe littéralement sur scène, munie de grosses lunettes noirs pour cacher sa douleur face à sa nourrice désemparée (magnifique Nada Stacar). Et lorsqu’elle apprend que finalement Thésée n’a pas succombé à la guerre, elle se précipite vers l’armoire à pharmacie pour chercher des calmants. On se délecte de ce personnage.
Hippolyte lui aussi prend toute sa dimension. C’est un jeune homme rebelle. On est un peu moins séduit par le rôle de Thésée (Olivier Werner), homme bourru, drapé dans sa peau de bête. On aime néanmoins la façon dont Christophe Rauck le fait surgir. Il arrive par le sol en défonçant le parquet avec une armure à la tête de Minotaure.
Cette version de Phèdre est décapante, inattendue, et prouve une nouvelle fois qu’il est toujours possible avec les classiques de nous surprendre. Sans rééditer l’excellence des Serments Indiscrets, Christophe Rauck signe un spectacle maîtrisé, personnel et qui se tient de bout en bout.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire